Les BIM débarquent en France. Ces maquettes numériques couplées à une base de données pour rassembler toutes les informations d’un bâtiment, concernent tous les métiers de la construction et donc l’INSA de Strasbourg. Bienvenue dans le bâtiment 4.0 ?
L’acronyme signifie « building information model », soit en français, « modélisation des données du bâtiment » ou « maquette numérique du bâtiment ». Elle associe un modèle 3D et une base de données qui répertorie toutes les informations relatives à un bâtiment : dimensions, matériaux, couleurs, modèle, fabrication, label, etc. L’idée est d’avoir, pour chaque édifice, un fichier unique pour les architectes, les ingénieurs, les maîtres d’ouvrage, les techniciens, les géomètres, les artisans, les économistes, etc.
On comprend alors les avantages : moins de sources d’erreurs et de pertes d’informations, gain de temps, mémoire du bâtiment, calculs et simulations facilités, meilleure collaboration entre les professions, maintenance et gestion améliorées, etc. BIM désigne aussi bien le résultat (un méga-fichier unique, renseigné et partagé) que le processus, nécessairement collaboratif. Les architectes et les géomètres-topographes en sont à l’origine, les autres métiers ajoutent et utilisent des informations.
A l’INSA de Strasbourg, les BIM sont très présents en topographie, ils apparaissent en génie civil et émergent en architecture et en génie climatique et énergétique.
Philippe Leroy, directeur d’INSA entreprises : « Nous sommes la seule école en France à réunir toutes ces spécialités. Si des entreprises souhaitent travailler sur ce thème en croisant les métiers, nous avons tout ce qu’il faut. Je rêve d’une chaire qui réunirait des industriels, nos laboratoires et nos plateformes pour travailler sur le BIM. »
Voyons comment les spécialités s’emparent du BIM (projets d’entreprises, recherche, formation…) et quels sont les enjeux pour leur corps de métier.
Axe 1 – Topographie : le BIM tel que construit
La topographie est la spécialité de l’école qui travaille le plus sur le BIM, sans doute parce qu’elle recourt depuis longtemps aux outils numériques : SIG (systèmes d’information géographiques), photogrammétrie, balayage laser 3D, données GPS, etc. Il s’agit du BIM « tel que construit », parce qu’il concerne les bâtiments existants. S’ils sont patrimoniaux, les anglo-saxons parlent de « H-BIM » (Heritage).
Deux thèses sont en cours dans l’équipe TRIO[1] du laboratoire ICube pour numériser des bâtiments et les structurer en BIM. L’une, en partenariat avec l’ordre des géomètres, vise la création automatisée des maquettes 3D à partir des nuages de points des relevés 3D (lire à ce propos le portrait de la doctorante Hélène Macher). L’autre, financée par la fondation chinoise pour la science, s’intéresse à la sémantique et à la manière de renseigner les différents éléments de la base de données.
« C’est par la recherche que l’on avance » estime Pierre Grussenmeyer, professeur des universités à l’INSA. « Nous sommes également partenaires de l’université Carleton à Ottawa, leader sur les H-BIM, dans un projet de recherche sur 7 ans avec l’échange d’étudiants et de doctorants ».
En matière de formation, un module électif inter-spécialité sur le BIM devrait être créé au plus tard à la prochaine rentrée, l’idée étant de tirer bénéfice de la pluridisciplinarité de l’école pour initier les étudiants à ce concept par essence pluridisciplinaire.
Les projets de fin d’étude (PFE) sur les BIM sont de type prospectif (dresser un état des lieux et comparer les outils existants) ou s’intéressent à la partie base de données (ajout et organisation des éléments). Des projets de recherche technologique (PRT) sont également consacrés au BIM et portent par exemple sur le H-BIM, sur le développement du numérique dans le bâtiment en partenariat avec la DREAL ou sur les formats utilisés.
Le BIM était le thème central des dernières Journées de la topographie, sous l’intitulé « Le mystère BIM », avec l’intervention d’architectes et d’entreprises. Mystère, car de nombreuses interrogations demeurent et beaucoup de choses restent à développer, en matière de logiciels, d’outils, d’harmonisation, de compatibilité…
Par Stéphanie Robert
Nuages de points intérieurs du bâtiment de l’INSA Strasbourg (environ 74 millions de points !)
Identification des murs à partir des nuages de points (1er étage de l’INSA Strasbourg)
Ces figures sont le fruit du travail de thèse d’Hélène Macher sur les BIM.
[1] Télédétection, radiométrie et imagerie optique
Source image en une d’article : shutterstock_275999234©Lifestyle Graphic